Texte iconique et testamentaire, ce poème abandonné in medias res par Keats est un défi en même temps qu’un hommage aux fondements de l’art poétique. L’auteur-narrateur y dialogue en direct avec une déesse, Mnémosyne, puissance féminine fondatrice du langage et mémoire tutélaire, et il a le privilège d’écouter le récit mythique d’un Saturne déchu.
Ce plongeon initiatique dans un fantastique romantico-antique est aussi l’occasion de redéfinir la nature du poète authentique et son rôle dans la société, rôle qu’a aussi assumé son contemporain et défenseur, Shelley, pour qui « les poètes sont les législateurs non reconnus du monde » (Défense de la Poésie, 1821) — ce monde traversé en étoile filante par Keats, mort à vingt-cinq ans. Aussi la présente traduction en vers, avec le texte ori-ginal en regard, est-elle suivie d’extraits du poème de Shelley consacré à Keats, Adonaïs, et de La Nuée.