Voici un livre de douleur, peut-être intemporel. Ce récit d’une enfance battue et humiliée à l’extrême parut en France en 1963. L’auteur, militant libertaire, citoyen français réfractaire à la conscription de 1914, en a publié une première version en castillan, en Espagne où il était réfugié (1933). Une édition en langue française fut effectuée en 1945 en Belgique. Ces souvenirs évoquent l’expérience d’un enfant au début du XXe siècle. La cruauté effarante du vécu quotidien renvoie à des faits communs, banals, d’intensité variable, dont les codes instituent dans la collectivité des constantes, des habitudes, des gestes qui semblent aller de soi. Dans le dernier chapitre l’auteur énonce l’espoir que la lecture de ce livre, presque oublié depuis, incitera du moins à soutenir les victimes de maltraitances, les écouter, à deviner l’emmurement auquel les a condamnées ce qui constitua leur formation. Comme le craignait Gaston Leval, les faits de barbarie sont demeurés depuis, et bien d’autres adultes pourraient écrire des souvenirs analogues.