Une police politique proprement dite apparaît avec les régimes parlementaires
et représentatifs : les pouvoirs en place surveillent
leurs concurrents ; puis la publicité relative des débats est susceptible
de débordements et d’imprévus. C’est ce que suggère
l’auteur de cet ouvrage paru en 1867, dans une ambiance de
liberté très relative.
Celle-ci le conduit à une démarche ironique
: sous couvert d’historique, il esquisse des constantes de
la police politique moderne. À l’aide d’exemples incontestables
car puisés dans les Mémoires de responsables policiers de la
Restauration et la Monarchie de Juillet, il évoque : la provocation
(y compris de littérature subversive, hélas !) ; la manipulation
ou la création de toutes pièces de groupes destinés à être
jetés en pâture aux zélateurs de l’ordre public et voués à disparaître
au bagne, sinon sous la guillotine ; l’infiltration et la
suractivation de groupes fort paisibles, pour attester ainsi de
leur dangerosité ; le retournement des criminels en factionnaires,
au plus haut point illustré par le destin de Vidocq, etc.
Dans ce processus, la liberté individuelle, le secret de la correspondance,
le respect de la vie privée, apparaissent comme
des protections fragiles. Et les dehors historiographiques de ce
relevé permettent à l’auteur, qui n’a pas à juger si la police du
Second Empire poursuit ces méthodes peu recommandables,
d’évoquer pour conclure comment elle s’illustre dans des
affaires criminelles où des puissants sont impliqués…
Auguste Vermorel, journaliste, historien politique, ami
notamment de Jules Vallès et de Gustave Lefrançais, rédacteur
au Cri du peuple, nommé à la commission de la Justice pour la
Commune de Paris, participant aux combats pour dégager des
forts contre les troupes versaillaises, blessé durant la Semaine
sanglante, mort à trente ans de ses blessures et de désespoir
dans les transportations de masses qui suivirent la défaite —
mérite d’être redécouvert. Ses livres abordent, avec style et
passion, des moments historiques peu évoqués de nos jours.