Dans sa préface à ce dictionnaire de Georges Delesalle paru à Paris en 1896, Jean Richepin écrivait : « Organisme vivant en perpétuelle décomposition et recomposition, l’argot est essentiellement instable. Plus vite que la langue ordinaire, il se métamorphose. C’est du vif-argent. […] L’instantané qu’on en prend aujourd’hui n’est plus ressemblant demain. Aucun fixatif n’en assure l’exactitude. » Ce dictionnaire, conçu comme « tout à la fois historique et actuel », témoigne de faits qui depuis se sont transformés encore : des substantifs, des qualificatifs donnés dans leur acception argotique de la fin du XIXe siècle, se sont fondus dans d’autres sens, et d’autres emplois, de la langue non académique de notre siècle. Au jeu de la lecture se combine ainsi une distanciation suggérant que la vie a continué, que la langue est cette continuation même.