Fac-similé intégral d'une édition de la fin du XIXe siècle / Nombreuses illustrations in-texte et pleine page par Gustave Doré / En un volume, xxxii + 616 pages / Paru avril 2008. / ean 9782845050594 / Distribution Hachette
Écrits durant les années 1830, les Contes drolatiques constituent une œuvre unique dans la littérature du XIXe siècle. Exercice de style, pastiche linguistique inspiré à la fois d’une Renaissance quelque peu fantaisiste et des patois, elle demeure aisée et agréable à lire. Si la référence à Rabelais se justifie par certains récits de ruses, de batailles prodigieuses ou de gaudrioles scabreuses, c’est surtout vers le Décaméron, les Cent Nouvelles nouvelles, l’Heptaméron de la Reine de Navarre, ou Bonaventure des Periers, que Balzac oriente son inspiration. La juste précision des évocations galantes ouvre le jour à la plénitude du désir amoureux placé au principe d’un univers où les codes cruels, injustes, garantissant l’appropriation des êtres et le pouvoir des égoïsmes, le combattent à mort et toujours le voient resurgir (ainsi dans le très beau Succube), vivant idéal, rusant, fuyant, transgressant les interdits et les dogmes qui le guerroient. La multiplicité baroque, carnavalesque des emportements revient donc par-dessus l’ostracisme académique classique.
Mais surtout ce sont des thèmes spécifiquement romantiques qui forment l’essentiel de ces contes apparemment archaïsants. L’amour fou, le désir passionné et leur communion irrépressible, malgré la détresse, le désastre, la destruction même dont ils sont les victimes, émergent comme la véritable et plus haute beauté. De façon rare dans les Lettres de l’époque, la plénitude charnelle et émotionnelle de l’amour féminin est suggérée et défendue. Enfin le portrait, le tableau de mœurs ironique qui en ressort est comme rehaussé et salué tout au long de la mise en pages par les gravures de Gustave Doré, satiriste et lyrique à la fois.